Le Perchoir
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 Pénombre

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AuteurMessage
Lauralune




Messages : 16
Date d'inscription : 22/07/2017
Age : 31

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MessageSujet: Pénombre   Pénombre Icon_minitimeJeu 30 Nov - 21:55

Bon jme lance

(596 mots)
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Ce n’est pas que le monde a perdu ses couleurs. Je me demande simplement : en a-t-il jamais eu ?

Lasse que je suis, affalée sur mon fauteuil mon carnet à la main. Rien ne change, rien n’a changé. Ma lampe grésille et plonge par intermittence la pièce dans le noir. Il doit sûrement faire nuit dehors. Depuis combien de temps ? Mes rideaux opaques sont tirés et prennent la poussière. Les heures se succèdent et les minutes aussi au rythme de l’ampoule de cette lampe stupide. Je relis les pages remplies de mots, d’une écriture brouillonne ou soignée, la mienne. Ai-je jamais été heureuse ? Les passages ne sont pas datés mais ils se succèdent dans une complaisance entêtante. Dans une douleur qui ne s’éteint pas. Et voilà de nouveau que j’écris pour ne rien dire. J’écris pour de rien, pour de faux, comme pour me dire que j’existe. La mine de mon stylo s’enfonce dans la chair tendre de mes pages. Et l’encre s’échine à noircir ma pauvre fenêtre sur la vie.

La dernière fois que je suis sortie pour acheter mon pain je voyais très clairement comme des cercles concentriques réduire mon champ de vision. Je me retrouvai bientôt aveugle errant sur le trottoir vers la boulangerie. Aveugle choisissant ma baguette et payant sans voir le sourire de la boulangère. Aveugle sur le chemin du retour m’appuyant contre le mur rêche des immeubles de la rue. Je ne veux plus sortir. D’ailleurs, je ne sors plus.

« Dehors » n’est qu’un monde étrange, peuplé d’individus qui ne se comprennent pas.

Jour après jour mon poignet s’ankylose et ma plume devient plus lente. Les mots débordent sans que je puisse les écrire assez vite. Alors ma pensée s’absente faisant de moi cet être pas tout à fait mort. Je sens mon regard vide, je le sais. Mes yeux me piquent à rester fixés sur quelque chose que je ne vois pas. Ou que je ne veux plus voir. Parfois j'aime cette faiblesse qui m’anesthésie. Qui enrobe mes sens d’une couche de ouate et qui ralentit mes mouvements comme ceux d’un oiseau dans une mer de pétrole. Et si je coule alors tant mieux. Je serai débarrassée d’un passé qui m’encombre. Je n’aurais plus peur de tout.

Plus peur de sortir, plus peur d’être nue, plus peur des autres, de n’importe quel inconnu qui passerait trop près de moi. Plus peur du mensonge de mon propre sourire. Plus peur de mon reflet dans les yeux de mes proches. Plus peur de vivre. Plus peur de mourir.

Je me souviens pourtant de mon rire. Des jupes que je portais pour courir. Je me souviens d’une vie comme un rêve qui s’efface au réveil. Je crois me souvenir du bruit de mon rideau qui s’ouvre. Bois contre bois, le choc des anneaux sur la tringle. Et un instant je sens cet élan qui voudrait me lever et laisser pénétrer la lumière. Mais la mollesse de ma chair me rappelle à mon fauteuil. J’attends que ma lampe s’éteigne tout à fait. Resterai-je alors plongée dans le noir ? Peut-être ne verrai-je même pas la différence. Et au moins je n’aurais plus à supporter la vue de mon corps, étranger à moi même.

J’ai parfois l’impression qu’il aurait suffit d’un rien. D'un rien à la place de toi. Si seulement...
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